Kap2cap était à l’hivernale des Marmottes à Saint-Véran
Rien de mieux qu’un grand bol d’air frais. C’est ce qu’on s’est dit à la rédaction de Kap2cap. Du coup, on est parti faire un tour de bécane en montagne pour une petite concentration d’hiver chez les Marmottes à Saint-Véran. Une centaine de personnes se sont retrouvées dans la plus haute commune d’Europe par -10 degrés. Et ils avaient l’air heureux les bougres !
Les marmottes en toute intimité
Moins on est de fous, plus on rit ! Ils n’étaient pas nombreux cette année mais certains braves venaient de loin : Bayonne, Tours ou encore Paris. Une ambiance intime pour un weekend entre privilégiés. D’ailleurs, ils n’aiment pas trop les grands rassemblements où certains ne viennent que pour chercher un patch à afficher. Ici, on vient partager sa passion d’une moto rustique et exigeante, faite de galères, de bricole et surtout de rencontres.
Une hivernale comme celle là, c’est l’occasion parfaite d’échanger des conseils et des récits sur ses voyages. Ici, le Cap Nord est un passage obligé pour tous quasiment. « J’ai fait 15 000km en 3 semaines, j’ai pointé le Cap Nord et j’ai fait le tour de la Scandinavie », raconte Dédé qui a passé son permis à 50 ans. « J’ai discuté avec un mec qui revient du lac Baikal en side-car, j’ai appris plein de trucs », nous dit Yannick content de sa soirée. Ce petit jeune de 34 ans a passé son permis moto en 2012 et acheté son Ural peu de temps après. Déjà quelques destinations affichées sur son side et l’envie d’aller encore plus loin.
Nous aussi, on aime bien cette idée d’apprendre de ces rouleurs un peu givrés. Alors, on a fait le tour des tentes et des braseros pour glaner quelques conseils et des astuces.
Déjà, il faut arriver
Pour rejoindre une hivernale, il faut pouvoir atteindre sa destination. Si la route est noire, c’est à dire dégagée de toute neige, il suffit de rester vigilant. Mais quand la neige se met à tomber et que la route blanchit, mieux vaut être équipé.
Nous découvrons que les motos aussi peuvent mettre des chaînes sur leurs roues. « Ce sont des chaînes pour les 2CV, ça se monte très facilement et ça tient ! », nous expliquent plusieurs marmottes. Mais beaucoup bricolent des chaînes “maison” avec des jugulaires de casque qui s’attachent directement sur la jante. Sur une Royal Enfield Bullet 500, on découvre l’astuce de Bébert : « Je mets des grosses ficelles sur mes roues, ça marche plutôt bien». La petite mule indienne fait le reste avec le couple de son monocylindre longue course.
On tombe sur une Transalp avec des skis. Ça nous fait sourire et nous prenons cela pour une excentricité. Trois GS plus tard, on découvre qu’il s’agit d’une vraie astuce. La taille varie, avec ou sans amortisseur, mais toujours du “fait maison” encore une fois. Dédé nous explique l’intérêt: « ça permet de ne pas avoir à sortir les jambes sur la neige. C’est très efficace et c’est mieux que de devoir relever la moto, parce que ma GS elle fait près de 280kg quand même ! ». On assiste même à une petite démonstration de pilotage de nuit pour finir de nous convaincre.
T’as le look coco
Après avoir fait une hivernale, vous ne vous moquerez plus des motards en manchons. Enfin, sauf en ville. Le manchon, avec poignées chauffantes si possible, c’est l’arme ultime pour rouler par grand froid. Le meilleur moyen pour garder ses mains bien au chaud. Le tablier aussi, est très efficace pour se protéger le bas du corps. Et dans son contexte, ça ne fait pas de vous un livreur Uber beats. Pour les plus frileux du postérieur, une peau de bête jetée sur la selle vous gardera au chaud. En plus, ça vous donnera un look de cowboy du plus bel effet.
De toute façon, le froid, tous connaissent bien. Habitués à des voyages par -30°c pour aller en Sibérie ou en Laponie, les vieux briscards savent s’équiper. “Je vais au rayon chasse et pêche chez Decathlon. C’est pas cher et ça protège vraiment bien” nous explique Thierry. Il est vrai qu’avec un petit budget, il n’est pas forcément simple de trouver son bonheur avec des équipements motos bien plus couteux.
Enfin, Willy nous a montré son petit montage maison pour dégivrer sa visière. Deux filaments sur les bords de l’écran, fixés par un adhésif spécial qui résiste aux températures élevées. Un branchement en direct sur la batterie. Facile mais il y a quelques pièges, « sur ce câble je n’ai pas trouvé la bonne gaine pour bien le protéger de l’humidité alors je le cache un peu sous la selle. Pour les fils, il faut aussi trouver la bonne tension pour ne pas tout faire fondre ».
Savoir recevoir
Maintenant que vous avez planté la tente, il faut passer aux choses sérieuses. Une hivernale c’est du partage. A peine débarqué qu’un premier groupe, réuni autour d’un feu, nous tend une bière: « et tu n’as pas ramené de bouteilles toi ! Comment tu veux te faire des amis ! ». Pierre, surnommé cailloux rajoute « il te faut un gobelet ! Comme ça les gens vont t’inviter à boire un coup et à discuter, c’est la règle de base ». Un faux-pas très vite pardonné pas nos hôtes.
Les sidecaristes sont les mieux équipés pour le barbecue. Normal, ils peuvent en embarquer plus : les tables, les chaises et le trépied pour la grille au dessus du feu. Certains ont même une remorque prévue uniquement à cet effet. Mais il y a aussi des petits objets auxquels on ne pense pas forcément dans son kit de voyage. Baptiste tient un petit souffleur dans la main « c’est de l’air chaud pour dégivrer la moto ? ». Il rigole, « non c’est pour souffler sur les braises du barbecue ! ». Tout aussi important.
Les conversations poussent jusqu’à tard dans la nuit. Les marmottes discutent autour des préparations sur leur moto, à la lampe frontale. Petit cours de snowboard tracté par un side, la Verveine à 38° de Bob terminée, il est temps d’aller se coucher.
Passer une bonne nuit
Deux nuits passées à la fraîche et pourtant, au réveil les mines étaient bonnes et les sourires toujours là. Il y a bien un secret derrière ça. Même plusieurs secrets.
Le plus important, c’est de s’isoler du sol gelé. De la paille, un tapis de sol ou encore des couvertures de survie étalées sur la neige. Baptiste et Yann, les petits jeunes ont une technique à l’ancienne et très « fashion »: la peau de chèvre « ça isole vraiment bien la peau de bête ! ».
Du haut de ses 77 ans, Marcel nous explique sa technique plus moderne, élaborée au fil des décennies et des hivernales, « une couche d’alu pour isoler, un tas de feuilles, ensuite un petit matelas gonflable et enfin je me glisse dans 3 duvets ! ». Il a même dû avoir chaud le Marcel.
Gilbert lui, mise sur un très gros matelas gonflable bien épais : « et quand tu te mets dans le duvet, il faut enlever tes vêtements », non pas pour le côté sexy mais pour laisser la chaleur du corps rayonner dans le sac de couchage. Plus surprenant, Bébert dispose aussi d’un chauffage dans sa tente. Le luxe ! « J’ai appris ça chez les chasseurs alpins, c’est une bougie chauffe-plat, tu la glisses là-dedans, dans cette conserve et ça maintient la température dans la tente à zéro degrés. » Il faut juste être prudent pour ne pas tout brûler en renversant l’installation.
Yannick et Blandine ont passé 2 nuits en amoureux à Saint-Véran : « la première nuit on se les gèle, mais après la deuxième se passe bien ! », explique Blandine, pas effarouchée par sa troisième hivernale. L’astuce du jeune couple ? Un petit muret de neige autour de la tente pour empêcher l’air glacial de rentrer.
Finalement, le plus compliqué pour dormir en hivernale, ce n’est pas le froid mais les jeunes qui ont fait la fête jusqu’à 5 heures du matin. “On a fait la même quand on était jeune” relativise Marcel. La relève est à la hauteur des ainés semble-t-il.
Savoir repartir digne
La neige s’arrête de tomber, le café est presque fini. C’est bientôt le moment de repartir. Encore faut-il pouvoir redémarrer son engin. Dans le campement, tout le monde est préparé et l’entre-aide tourne à plein régime.
« Start Pilote est ton ami ! », se marre Bob. C’est un spray qui aide au démarrage du moteur en améliorant la combustion et le mélange air/essence. Il suffit d’en mettre juste un peu dans le filtre à air et hop !
Pour Yann, l’indispensable, c’est le booster « La preuve ! Ma moto c’est une Triumph un peu fragile au niveau de la batterie. Elle est neuve mais elle ne démarre pas ce matin. » Un coup de booster et c’est reparti. On en reparle bientôt sur Kap2cap.
La moto démarrée, il faut redescendre jusqu’à la plaine. Les plus sages attendront que la route redevienne noire. Mais les pentes du village sont encore verglacées. D’ailleurs, avec notre petite Himalayan on s’est fait avoir ! On aurait du suivre le conseil de l’ingénieux Bébert: « tu mets la première, tu coupes le moteur et tu te sers de l’embrayage comme d’un frein pour ralentir la moto ».
Le mot de la fin sera pour Bob, avec le conseil le plus important : « il faut revenir, faire plusieurs hivernales et surtout les plus petites ! Elles sont plus conviviales que les grands rassemblements. » Bob nous a invité à La Burle, organisée à Fay sur Lignon (Haute-Loire) début mars. Yann, nous propose de venir dans le Vercors le mois prochain. D’autres, vont carrément partir pour voir les aurores boréales en Finlande.
(c) Photos : Emerick Houplain
Les photos des Marmottes de Saint-Véran
Cet article a été écrit par Julien Muntzer: “Journaliste depuis 2010, j’ai d’abord été reporter pour France24 et TV5Monde avec beaucoup de voyages en Afrique. Mais comme je suis un peu farfelu et surtout obsédé par la moto depuis gosse, j’ai décidé de remonter en selle à la trentaine. La moto, c’est le fil rouge idéal pour vivre et raconter de belles histoires, en en prenant plein la gueule”.
J’aime pas l’hiver, mais partager autour de la moto ça donne toujours du baume au cœur. A tenter donc.
Pour en avoir fait une un jour, je confirme que l’ambiance est top. Les rencontres sont très intéressantes.
Bonjour,
Cela doit être un truc de fou de participer a ce genre de réunion, je suis en admiration devant autant de courage, mais comme il est dit dans ce texte, il fait y aller pour le partage et les rencontres et pas simplement pour récupérer un pin’s a ajouter, c’est la passion qui doit parler.
Bravo a tous,
Eric
j’adore aller aux Marmottes, j y suis allé plusieurs fois dans les années 90 en sidecar.