La course sur route ce n’est pas un truc de bourrin contrairement à ce que laissent à penser certains clichés. C’est plutôt un art délicat, celui de trouver de la douceur sur un tracé torturé par les bosses et le relief. Pour ce dernier jour de course, j’ai discuté avec François Grimonpont, pour vous faire découvrir quelques secrets de réglages sur la moto.
François, c’est le metteur au point du team Optimark sur ce TT. Une espèce de gourou des données qui possède 20 ans d’expérience dans le monde de la course, 10 années passées dans les paddocks du Superbike, quelques titres de champion de France et pas mal de pilotes qui ont travaillé avec lui. Il collabore actuellement avec le team TWR et notamment avec le pilote Loïc Arbel en 600 supersport. « Les courses sur route, c’est ce qui me fait rêver depuis toujours. Ici, tu croises Dunlop et Hickman tu discutes avec eux sans problème. C’est plus chaleureux comme ambiance, c’est peut-être aussi lié au fait que les risques sont plus grands que sur un circuit. »
Savoir être frugal
Sur l’île de Man, tous les breuvages ne sont pas consommés sans modération. Les motos engagées pour le TT doivent pouvoir tenir 2 tours des 60 km du tracé, sans déjauger, c’est à dire sans manquer d’essence jusqu’au ravitaillement, ” le but, c’est de consommer le moins d’essence possible, parce qu’on veut perdre le moins de temps possible au ravitaillement. On n’a pas de remplissage rapide, c’est un simple pistolet de pompe”, explique François. Un passage par les stands, c’est 30 secondes de perdu. Une consommation maîtrisée peut faire gagner jusqu’à 10 secondes qui peuvent faire la différence dans un classement très serré.
Les motos du TT disposent d’un réservoir de 24 L pour la 1000 cm³, 22 L pour la 600 et 20 L pour la Supertwin ” donc on consomme en moyenne 9 L sur les 60 km du tour, avec de l’essence ordinaire qu’on va acheter à la station-service à côté. À titre de comparaison, sur un circuit comme Magny-cours, c’est 0,9 L pour 1 tour de 4,4 km”.
Plutôt raisonnable pour des motos qui possèdent des moteurs comparables à ceux de Mondial Superbike, puisque le TT cale son réglement dessus. “Notre 600 Supersport développe 143ch à la roue, on serait à 130ch si on suivait le réglement du championnat de France”, explique François Grimonpont le metteur au point.
Être chaud sans se mettre trop la pression
Comme sur circuit, les équipes utilisent des couvertures chauffantes dont le but est de permettre d’obtenir une pression optimale du pneu dès le départ.
“ On est à 80°c pour l’avant et 90°c pour l’arrière. C’est ce qui fonctionne bien ici. Si le temps est plus chaud, on rajoutera 10°c. On chauffe plus le pneu arrière parce qu’il est plus sollicité”, m’explique François qui me donne la pression des pneus au moment d’enlever les couvertures : ” on roule avec du Metzeler, donc on est entre 2,3 et 2,4 bars sur l’avant et entre 1,6 et 1,7 sur l’arrière.”
Je découvre grâce à François la différence entre les manufacturiers de pneu. Finalement, ce n’est pas que du fétichisme d’avoir sa marque : ” avec les Pirelli et les Metzeler, la carcasse est moins dure, ça peut te créer plus de mouvement. Par contre, on travaille avec des pressions supérieures que le Dunlop qui a traditionnellement une carcasse très rigide. Tu es à 1,6 bar avec du Metzeler quand le Dunlop va être à 1,2 bar.”
La pression du pneu peut être diminuée pour avoir plus de grip, mais le problème, par exemple en enlevant 100 g, c’est que la carcasse risque de chauffer beaucoup plus, ” c’est ce qu’il se passe en ce moment avec les pneus Dunlop. Ils ont trop chauffés et ont déchapés”, décrypte François en faisant référence à la récente course North West 200 qui s’est courue avant le TT.
Quand le pilote revient, les mécaniciens sautent sur les pneus immédiatement pour vérifier la pression, “Il ne faut pas qu’ils aient le temps de refroidir, pour que la pression ne chute pas. Ça nous permet de savoir si elle a été stable et si on a trop chauffé les pneus ou pas assez au départ”. François affine aussi les réglages du châssis en fonction de ces informations, “si le pneu arrière est beaucoup plus chaud quand le pilote revient, c’est peut-être que la moto travaille plus sur l’arrière et qu’il faut peut-être régler le châssis. Mais ça, ça dépend aussi du style de pilotage”.
Être bien suspendu
C’était la question qui me travaillait le plus. Comment régler les suspensions sur un tracé qui bastonne le pilote, lui fait faire des sauts, puis prendre des épingles, puis rouler à fond pendant plusieurs dizaines de kilomètres ? La réponse du metteur au point est finalement assez simple.
” Comme il y a des grandes montées et des grandes descentes, on utilise des settings hydrauliques qui sont généralement assez durs, mais assez ouverts, pour que l’hydraulique puisse éviter d’exploser les suspensions en butée”. C’est le cas sur les quelques sauts et autres compressions qui parsèment le tracé. Le pilote se retrouve un coup debout pour encaisser le saut, un coup à frotter le sabot moteur sur le bitume, “sur ces moments-là tu ne peux rien faire, la suspension va aller en butée, donc tu travailles sur les autres virages.”.
Mais François m’explique une petite nuance, “on utilise des gros ressorts qui ne sont pas trop préchargés pour que la moto soit tenue en début de course avec le ressort, mais que justement elle ne soit pas hyper vives sur les bosses”. L’objectif, c’est de rendre la moto docile, que le pilote ne soit pas surpris et puisse tenir sa trajectoire. Bref, François et Xavier veulent de la douceur dans ce monde de brutes.
La moto doit donc être homogène sur tous les virages et si besoin, le pilote peut compenser avec son corps. Il y a aussi la spécificité de la course sur route, qui fait que le pilote ne prend pas des gros freinages, comme sur circuit.
Un tour de magie
Pour parvenir à régler la moto efficacement, le team Optimark s’appuie sur l’acquisition de données. François décharge les données après chaque session et peut ainsi analyser avec Xavier, le pilote, le tour dans les moindres détails. ” Elle est utile, mais moins indispensable que sur circuit, où les pilotes sont des métronomes sur les tours qu’ils effectuent, donc on peut travailler dans la précision avec ces données”, explique François. Cet outil, c’est un vrai plus pour le team qui peut ainsi régler plus rapidement les motos, “Sur la Supertwin, on n’a pu faire que 3 tours avant la course, et grâce à ça on a pu régler la moto comme il fallait et faire 10e à l’arrivée, alors qu’on est parti 33e”. Une grosse performance à tous les niveaux.
Les données sont surtout utilisées pour voir si l’assiette de la moto est correcte, si elle pivote bien quand le pilote lâche son frein, si elle tourne bien. Ensuite, c’est l’équilibre entre le train avant et le train arrière qui est réglé.
Parfois, c’est François qui signale à Xavier qu’il y a quelque chose qui ne va pas sur un virage et qu’il peut améliorer. François ressemble alors à un enquêteur, “je lui pose des questions types qui me permettent de comprendre son ressenti. Par exemple, s’il remet les gaz et que la moto écarte, c’est qu’on n’est pas assez tenu sur l’arrière. S’il sent que la moto balaye de partout et qu’elle n’est pas stable, c’est qu’on est trop sur le train avant.”.
Le commentaire pilote et l’acquisition de données sont complémentaires. Dans la semaine, l’équipe a enchaîné un warm-up lap avec une course, sans avoir le temps de sortir la moto du parc fermé avant la course suivante. “ On a discuté avec Xavier après son tour, on a changé le braquet, retravaillé la suspension arrière et un peu le train avant. Et on s’est lancé dans la course. Mais on a été surpris par l’homogénéité du châssis alors qu’on a peu roulé avec. Ce travaille de fond, c’est grâce à l’acquisition de données qu’on a pu le faire en si peu de temps“, conclut François.
Expliqué comme cela, c’est finalement assez simple de préparer une moto pour le TT. François me jette un regard, secoue la tête. Je pense que je me suis emballé dans ma conclusion …
Cet article a été écrit par Julien Muntzer: “Journaliste depuis 2010, j’ai d’abord été reporter pour France24 et TV5Monde avec beaucoup de voyages en Afrique. Mais comme je suis un peu farfelu et surtout obsédé par la moto depuis gosse, j’ai décidé de remonter en selle à la trentaine. La moto, c’est le fil rouge idéal pour vivre et raconter de belles histoires, en en prenant plein la gueule”.
juste idéale. je suis très gros fan du tt depuis quoi sans lentiry 5 ou 6 ans. et deouis je suis accro au tant au vidéo qu’ai jeux sûr PS4 je le régal. j’ai eu un souci avec le 2 mais je réconforte avec le 1 qui le parée plus exigeants il le semble.
avec tous les respect fait nous rêvé toujours plus j’en redemande encore encore et… vous avez compris quoi. moi jeror. au faite. Big UP et merci pour tt c merveille
les supsensions ont un debatement de combien? 120mm ou olis?
Bravo pour ce reportage en immersion!
Bonjour,
Je me demande encore avec quels processeurs les cerveaux des pilotes travaillent?
C’est incroyable que sur ce genre de “circuits” être a fond dans des passages qui nous semblent improbables, être secoué avec toutes ces bosses et ces jumps, se retrouver plein soleil, puis le centième de seconde suivant être dans la pénombre et toutes les autres difficultés, ils arrivent encore a analyser finement les paramètres a modifier afin de gagner quelques dixièmes.
C’est hommes la sont des super-héros !
Merci a vous pour tous ces articles sur cette course emblématique.
Eric