Au salon du 2-roues de Lyon, je suis passé prendre un café chez Ducati. Au-delà du fait que les clichés ont la vie dure, surtout quand le café est bon, c’était l’occasion d’en savoir un peu plus sur le trail DesertX. J’ai tenu la jambe à Antoine Meo, le pilote officiel et à Jérémy Faraud, le designer de la moto. Voici ce qu’ils m’ont raconté sous l’influence de la caféine.

La DesertX, un hommage et une moto du futur

Jérémy Faraud, ce nom ne vous parle pas forcément, mais sachez que c’est le type qui a dessiné la StreetFighter V4 et le Scrambler DesertSled, entre autres. Un gars avec un job de rêve, aussi talentueux que sympa.

Pas de bol, je suis aussi relou que bavard. Alors, je lui ai parlé d’emblée de la MV Agusta 9.5 : “On ne s’est pas posé la question puisque notre concept date de 2019. Quand on voit le résultat final, les deux motos sont très différentes. Moi, personnellement je la trouve jolie, surtout que c’est un copain qui l’a dessinée !”. Je vous avais dit qu’il était sympa Jérém’.

“C’est juste dommage qu’ils ne soient pas restés sur l’idée de faire renaitre Cagiva avec des motos électriques, l’idée était géniale. Ils ont préféré réagir par rapport à nous, dommage”, conclut Jérémy.

Il faut que je vous dise, à ce moment de mon article, que la DesertX est très élégante en vrai. Le blanc mat et les lignes épurées lui donnent un côté “2001, Odyssée de l’espace”. ” Oui, c’est vrai !”, sourit Jérémy, “notre but était de montrer une moto contemporaine, voire futuriste.” Et avec les tenues Ducati blanches, c’est le total look d’explorateur de l’espace ! “Le blanc était très utilisé au début des rallyes-raids. Pour refléter le soleil et ne pas avoir trop chaud. On retrouve notamment du blanc sur le toit des premiers Defender”.

Qu’en est-il de l’héritage Cagiva dans cette moto ? Après tout, Ducati aussi revendique une partie de cet ADN. Jérémy était préparé à ma question : “Il fallait faire un rappel au passé, mais aussi se détacher de la marque et du modèle de l’époque. Cette DesertX, ce pourrait être n’importe quelle moto des années 90″, explique-t-il, “le concept présenté en 2019 avait reçu un très bel accueil, alors on est allé plus loin que le Scrambler, on a fait une moto pour concurrencer l’Africa Twin”. 

L’ambition de Ducati pour cette moto est élevée. Comme le prix d’ailleurs. À partir de 16 560 euros pour la version de base, et vous ne pourrez pas choisir la couleur puisqu’il n’y a que du blanc. 

Une moto orientée off-road mais accessible

Si j’ai bu autant de cafés, c’est aussi la faute d’Antoine Meo. Le mec qui ne se lasse jamais de répondre aux questions. Merci Antoine !

Le quintuple champion du monde est devenu le pilote officiel pour la DesertX, et ce n’est pas simplement un ambassadeur potiche : “Ma parole est vraiment prise en compte, les ingénieurs sont à l’écoute, ils retiennent 90 % de ce que je dis. Parfois, ils me disent que ce n’est pas possible, mais c’est le jeu et il y a un vrai plaisir à échanger entre nous”.

La moto est encore en développement, les ingénieurs affinent les derniers détails. Antoine étant encore l’un des seuls à avoir le droit de se mettre au guidon, je lui ai demandé comment il se sentait sur les premiers kilomètres : “J’ai roulé sur un circuit de cross récemment, la moto est un peu lourde forcément (comparé à une enduro, ndla), il faut avoir un physique plus costaud, mais elle se conduit super bien, elle réagit bien, j’ai atterri un peu de travers après une bosse et elle a rattrapé le coup de manière très saine. On est même surpris de ne pas encore avoir trouvé la limite !”, explique le pilote en souriant.

Même s’il n’allait pas me dire que sa moto était une merguez, j’avais envie de le pousser un peu pour parler des défauts et notamment du poids important de la machine : “La moto est bien dimensionnée, elle est un peu lourde avec ses 220 kg, mais avec le bicylindre en V, le second cylindre est placé de manière centrale et en bas. Du coup, il y a moins de poids sur la roue avant que sur la Ténéré 700. C’est une moto bien équilibrée”, m’explique-t-il alors que j’avale un treizième ristretto en tremblotant.

Dans le trail, c’est le même moteur Testastretta 11° de 937cc que dans la Multistrada V2. Il développe 110 chevaux pour 92 Nm de couple, “c’est un moteur puissant, coupleux mais pas inexploitable grâce à l’assistance électrique de la commande de gaz. C’est même un peu trop doux en bas pour prendre les tours quand on est sur un circuit de cross”, raconte Antoine, “avec les ingénieurs, nous avons beaucoup travaillé sur le moteur pour avoir de la présence à bas régime, pour qu’il soit vraiment exploitable en off-road.”

Après des années maxi-trails dominées par les puissantes BMW GS, le trail semble revenir à taille humaine, “Oui, plus accessible. Ducati voulait faire une moto off-road qui soit polyvalente, qui permette aussi de prendre du plaisir le weekend en roulant à deux, là où les motos d’enduro sont plus égoïstes et faites seulement pour le tout-terrain”.

Avec le DesertX, Ducati se lance dans la guerre du trail mid-size orienté aventure. Il existe au catalogue, une version orientée rallye-raid, déjà équipée de série comme il se doit : réservoirs additionnels à l’arrière (avec pompe électrique) et protections adaptées. Mais tout ça, je vous en avais déjà parlé lors de la présentation du DesertX (vous n’avez qu’à cliquer).

“C’est très différent de l’ADN Ducati ! D’ailleurs, tu n’as pas de service après-vente en Afrique, donc le client il va devoir arriver là-bas et se dépatouiller tout seul pour rentrer chez lui.” raconte Antoine Meo en s’amusant à cette idée. Ah, l’aventure !

D’ailleurs, Antoine va en vivre des aventures. La moto sera engagée sur plusieurs événements dès cette année, “avec Ducati, on va participer à des courses de régularité en trail, on va faire des courses extrêmes comme la Bassella race ou le prologue du Rodéo Erzberg“. Le café ne m’a pas fait halluciner, ils vont placer un trail sur des courses prisées des enduristes, un sacré challenge ! Antoine va pouvoir y trouver les limites de sa machine.

Surtout, la DesertX va se retrouver à l’Africa Eco Race en octobre, face à la Ténéré World Raid, sa concurrente la plus proche. Encore une bonne nouvelle pour cet événement africain. Encore une forme de déconvenue pour le Dakar qui ne semble plus vraiment connecté à la réalité de la moto pour les grands constructeurs.

Soudain, l’attaché de communication Ducati vient m’annoncer qu’il n’y a plus de café. Bourré de spasmes, je repars alors dans les travées du salon, tout excité.

Cet article a été écrit par Julien Muntzer: “Journaliste depuis 2010, j’ai d’abord été reporter pour France24 et TV5Monde avec beaucoup de voyages en Afrique. Mais comme je suis un peu farfelu et surtout obsédé par la moto depuis gosse, j’ai décidé de remonter en selle à la trentaine. La moto, c’est le fil rouge idéal pour vivre et raconter de belles histoires, en en prenant plein la gueule”.

Par |Publié le : 7 mars 2022|2 Commentaires|

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2 Commentaires

  1. Bill 10 mars 2022 à 12h09-Répondre

    Le prix est quand même conséquent vis à vis de ses concurrentes annoncées.. pour concurrencer la T7 WR il va falloir miser sur la bonne tenue de route et la polyvalence pour justifier +3000€, parce qu’à mon humble avis elle ne peut pas jouer dans la même catégorie en TT. l’Africa est peut-être plus a sa porté.

    J’aime bien le look !

  2. Antoine Smilyty 8 mars 2022 à 14h34-Répondre

    On va rire ….

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