Les Maîtres d’Orchestre

Les nuits sont aussi utiles que les jours. Celles de l’ile de Man sont spéciales. Après une séance d’essais, l’adrénaline est à son maximum. Je suis à bloc, et une heure après, quand tout retombe, j’en ai les jambes qui tremblent. Ensuite, vient le moment de se coucher, mais le cerveau, tellement excité par tout ce qu’il vient de vivre, continue sa course, refait les virages, comprend les erreurs. Mon coup de mou digéré, je me suis attelé à me détendre. Première étape, les kinés de la course. Ils sont dispos, gratuitement, pour remettre les corps des pilotes secoués en droite ligne. Pendant une bonne demi-heure, deux femmes s’occupent de mes jambes, de mon dos, et de mon cou, encore raidis des essais de la veille. Je commence à souffler.

Puis une main se pose sur mon épaule… C’est la grosse paluche de mon pote Mig qui me vient en aide. On regarde la vidéo embarquée de la veille, il corrige mes erreurs, m’explique les trajectoires… C’est la première fois que j’ai droit à des conseils de pilotage. Je n’ai jamais fait de stage, j’ai commencé la moto tout seul sur la route, et pris de mauvaises habitudes.

En fait hier, j’ai compris que je n’étais pas assez fort pour ne progresser que par moi-même. Certains pilotes commencent avec du talent, ce qui ne les empêche pas de travailler pour être au top, mais moi, je sais que je ne suis pas né avec ça. J’ai juste une grosse volonté, de l’envie, ce qui fait que je suis plus souvent à l’agonie qu’à l’attaque, comme dans les spéciales de rallye. Cette heure avec le Mig m’a apporté bien plus que toute une journée à faire des ronds sur un circuit. J’en apprends aussi avec Julien, et j’en comprends encore avec Fred Protat… Du positif, et je respire mieux. Au départ, je venais pour me qualifier.
Maintenant que la course a commencé, j’en veux plus, mais je me rends compte que je ne suis pas bien armé. Pas avec la moto, mais avec ce que je sais faire dessus, ce que j’en comprends.

Ce soir, je sais avant de partir que je vais bien rouler, parce que j’ai compris des chosesOn déconne un peu sur la mise en grille, et je pars pneus froids, mais serein. Quatre virages pour chauffer les Pirelli, et je déroule les conseils. Tout n’est pas parfait, mais je suis déjà plus en sécurité sur la machine. Et puis, un nuage, une forte odeur d’huile dans Gorse Knee… Je coupe, pensant voir une moto en feu… Mais ce n’est qu’un moteur cassé. Je reprends mes esprits, et déroule les 45 km restants comme une partition, avec quelques fausses notes et des talus un peu trop proches…

Mais je sens que je maîtrise mieux l’instrument. Fin du premier tour, et drapeau rouge. Trop d’huile dans Gorse Knee, les essais se terminent sur cette note positive. Seul point noir à l’horizon, la boite de vitesse commence à déconner. A moins que ce ne soit moi. Je dois parfois m’y reprendre en trois fois pour enclencher la 6. J’espère seulement que c’est mon pied qui commence à fatiguer (j’ai du mal à relever le pied gauche depuis un accident), et que la moto ira jusqu’au bout de la course lundi. Ma première course sur l’ile de Man arrive, putain…

J’en saurais peut-être un peu plus avec Stéphane, qui arrive ce dimanche, et qui touche à la mécanique comme Audiard à l’argot. En attendant, ce soir c’est chaleur et convivialité avec les autres équipes françaises. On part sur Douglas, à 9 dans mon camion 3 places, suivi de Ju et son équipe. Une bière, un restau, on arrive même à ne plus parler de cette ile qui nous obsède tant. Un brin de moto, un peu d’histoire, de bonnes vannes et quelques analyses nocturnes plus tard, on se quitte sur la baie de Douglas, guirlande de noël sur la mer d’Irlande… Demain, il faut préparer les motos pour notre première course. Dans 240km, 1104 virages, quelques sauts et quelques guidonnages, nous aurons inscrit modestement nos noms sur les tablettes de l’ile de Man.

Aparté d’un jour de pluie : Le Chef

Aujourd’hui, il pleut. Je me fais chier, et je ne t’ai pas présenté le Chef. Et comme j’aime bien raconter des histoires…2006, je suis étudiant à l’ISAT de Nevers. Un mec de ma promo, qu’on appelle 19 en référence à son numéro en catégorie 600, a attaqué la saison d’endurance avec un team du Loiret qui cherche un mécano pour l’épreuve d’Albacete. Il me propose la place, j’accepte, mais un mois avant le départ, je suis appelé pour l’éco marathon Shell, course à l’économie d’essence sur des voitures à trois roues. Obligé de décliner pour l’endurance, je trouve poliment un remplaçant, mon pote Edouard, histoire de ne laisser personne en galère. L’éco marathon est un échec, et j’en oublie l’endurance.

Un lundi d’avril 2007, en stage à Vibraye, dans la Sarthe. De retour d’un week-end compliqué au Bol classic. le téléphone sonne alors que je m’apprêtais à me coucher, à 18h (oui, très compliqué le week-end…). C’est Mig. Et quand Mig appelle…

« – Hé Momo, tu te rappelles que j’engage une Triumph au 24 heures du Mans !

–          Ben oui ! T’as pu avoir Rocco Siffredi en team manager comme prévu ?

–          Beu beu beu, ben non, j’ai pas réussi à le voir ! T’es toujours en stage à côté du Mans ?

–          Ben oui !

–          Bon, les Triumph ne démarrent pas, tu pourrais pas venir ce soir nous aider ? Les essais commencent demain…

–          … Ben oui, Mig, j’arrive… »

Je m’arrange avec mon chef de stage, qui me donne ma semaine. J’arrive dans le stand du Mig, que nous partageons avec le Alf’s Team où roule un certain Guy Martin… C’est la galère avec les Triumph, on finit par y arriver, mais je suis débarqué de l’équipe le jeudi, car elle doit être composée uniquement de filles, point crucial du projet, et comme c’était convenu depuis le début (d’où l’idée d’avoir Rocco pour boss… Encore une vaillante idée du Mig !).
Trainant ma tristesse dans le paddock, je tombe par hasard sur Edouard, qui poursuit cette année la saison d’endurance dans l’écurie où il m’avait remplacé l’année dernière… On discute, on boit l’apéro avec son team manager, Gilles, à qui je raconte mon histoire de débarquement… et quelques whiskys plus tard, le voilà qui me propose d’intégrer son équipe pour les 24 heures. Fabuleux !

Et c’est là que je rencontre le Chef. Stéphane Leseigneur, Normand de son état, devient ma référence pour cette course. Je l’écoute, le regarde, confirme tout avec lui… Puis, trois mois après, nous partons pour les 8 heures de Suzuka, une expérience exceptionnelle… On se lie d’amitié. Les passions sont les mêmes, l’amour de la moto, de la mécanique, et je reste en admiration devant ses talents. En 2012, j’organise pour le club dont je m’occupe un pèlerinage sur l’ile de Man. 39 bécanes, 49 motards, Stéphane est de la partie, c’était un de ses rêves, donc forcément…

2013, on se retrouve au 24 heures du Mans, moi en spectateur, lui toujours accroché à ses outils. On boit une bière autour du feu, on discute projets… Et je luis dis que ça y est, qu’après quelques rallyes et deux Chimay, je vais m’inscrire au Manx Grand Prix l’année prochaine… Et que j’adorerais qu’il soit mon mécano… Et c’est à cause de cette succession improbable d’évènements que dimanche, je suis allé chercher le Chef à l’aéroport de Castletown… Heureux de ne pas lui avoir menti, heureux d’être avec lui, même si j’ai un peu honte de n’avoir pas pu le faire venir par mes propres moyens. La classe en col bleu arrive sous ma tente. L’œil fait vite un état des lieux… et les outils ne restent pas longtemps à leurs places.

Riding for Eddy

Je suis dans mon camion, seul. J’ai enfilé la chaine avec une plaque portant mon nom, ma date de naissance, mon groupe sanguin, et le numéro de Céline. Je déteste ce bout de métal, mais il est obligatoire. J’ai mis mon tee-shirt de course, le noir avec l’hélice jaune et blanche dessus. Voilà 7 ans que nous faisons tous les départs ensembles.J’ajuste ma combinaison, pose les sliders rouge avec les trois jambes de l’ile de Man au milieu. C’est un des cadeaux des potes de mon club, en remerciement du voyage organisé ici en 2012. Ils sont neufs. Je m’étais promis de ne les utiliser que le jour où je roulerais ici. Ils attendaient dans le placard depuis deux ans, et moi, depuis toute ma vie.

Je respire lentement pour calmer mon cœur qui s’emballe. Je ferme les yeux. Je suis très exactement à la place où je dois être, même si je serais plus serein devant ma télé, vautré dans un canapé. C’est l’heure. Je me lève. Dans un frottement métallique, la porte latérale du camion s’ouvre sur la lumière, le vent, la vie. Stéphane et Jessy soignent la moto. Céline et Pimente s’occupe de moi. Une poignée de main pour les potes, un baiser pour ma femme, j’enfile mon casque. Devant moi, les drapeaux flottent. Le public. Onze motos et autant de moteur qui attendent de s’exprimer devant, une trentaine derrière. J’avance sur la ligne. C’est mon tour. Le public a disparu, les drapeaux aussi. Il ne reste que celui de l’ile de Man, qui s’abaissera dans quelques instants devant moi, et au loin, là-bas, Bray Hill. L’étoffe rouge flanquée des trois jambes tombe devant ma visière noire. C’est mon tour.

Après 17 ans à attendre, c’est mon putain de tour. Première boucle comme j’ai pu faire aux qualifs. J’essaie de me placer, j’enroule du mieux que je sais. Chaleur sur la bosse de Rhencullen, la moto redevient serpent avant d’attaquer la succession de gauche-droite-gauche-droite presque à fond, sans dégagement, sans horizon. J’y crois, j’en veux, c’est à moi. Je donne ce que j’ai, sans chercher à faire plus, mais je dégage la pression pour ne pas passer à côté de Ma course.
Fin du premier tour, je respire dans la ligne droite des stands, avale Bray Hill sans y penser, me fend d’un beau wheeling à Ago’s Leap, et d’une belle chaleur dans le gauche d’après. Ça passe, et je soude. Quelques pilotes me doublent, je vois mes points faibles, mais que la descente est bonne après Ballagarey… A fond de 6, en sortie de ville, je ne couperais les gaz que 6 bornes plus loin, à Greeba Castle…

La moto se tient bien sur cette section. Passage à Barregarow, et une pensée pour Eddy, le patron octogénaire du camping où nous allons toujours (le mari de Glynne, quoi…), qui a fait un malaise cardiaque vendredi. Il est à l’hosto, mes parents n’ont pas voulu me le dire, mais je l’ai appris par quelqu’un d’autre. Ce soir, je roule pour toi, Eddy, et dis-toi bien que je ne suis pas prêt à m’occuper de tes noisetiers, ceux que tu as ramenés de France avec fierté, quand tu es venu nous visiter… Je continue ma route, moteur hurlant. Tiens, j’ai oublié mes boules Quies. Pas grave, mais c’est pour ça que j’avais l’impression que ça gueulait sévère… Une nouvelle énorme chaleur sur la bosse de Rhencullen, le cadre se fait caoutchouc A retenir pour le prochain passage, que… ça se passera comme ça.

Quelques fusées me passent. Je m’accroche dans l’ultra bosselé, de Ginger Hall au K-Tree, et perd contact sur un freinage. Ma moto est réglée trop souple pour prendre de gros freins, et la moindre bosse lui fait danser la gigue au milieu des trottoirs. Fin du 2ème tour, je pense à m’arrêter au stand. Stéphane m’attend au loin. Il met la béquille, Jessy plonge le pistolet essence dans le réservoir, Céline me tend à boire et nettoie la visière, constellée par des moustiques suicidaires. Je repars, fais un signe à l’équipe en descendant St Ninians à bloc. La course a été réduite à trois tours, il m’en reste donc un pour atteindre mon but.

Je me suis habitué à la vitesse. Tout me parait normal. J’ai enfilé le papier percé dans l’orgue de barbarie, et je tourne la manivelle de virages en virages. Le soleil rasant devient gênant. J’ai mal aux yeux, et j’attends l’ombre pour envoyer tout ce que j’ai. Kirk Mickael, Ramsey, Gooseneck. Gooseneck, c’est l’annonce de la plénitude. Dernier virage avant la montagne, cette épingle à droite raconte la fin des bosses, des talus, de l’atmosphère étouffante des villages et des sous-bois. Maintenant, la route est lisse, et il n’y a plus que des ravins et des rochers. Paradoxalement, c’est à Gooseneck que ça redevient rassurant.

J’arrive dans Creg Ny Baa, et comme dans tout dernier tour les spectateurs applaudissent. Je tends un poing rageur et heureux. Je suis en train de le faire. Mais te déconcentre pas, espèce de con. J’enfile les dernières courbes en retenant mes émotions, passe Cron Ny Moona comme une bête, Signpost ventre à terre, puis c’est la petite enfilade de « The Nook », à l’arrêt, sous les arbres. Il fait presque nuit ici. Et d’un coup, les branches disparaissent, le ZX6R surgit dans la lumière dans une légère roue arrière Je le vois, il est là-bas, ce tissus blanc et noir qui m’attend, et qui ne sait pas que je l’attends depuis si longtemps. Je passe à côté, mais je ne le vois plus. Je n’arrive même pas à rentrer au stand. Je suis là, calé contre un mur, devant des spectateurs qui ne doivent pas comprendre. Pas comprendre que je pleure. Je pleure.

Et je pleure encore tous ces kilomètres à moto qui n’avaient que pour but de m’emmener ici, je pleure mes bécanes cassées à trop avoir essayé, je pleure les centimes gagnés dans plein de boulot pour les réparer. Je pleure mon rêve qui vient de se réaliser. Ce n’est pas le Tourist Trophy, mais c’est déjà tellement. Je ne peux pas rester là, j’en ai presque honte. Je passe la première et rejoint mon équipe. Je leur raconte, j’essaie de leur faire partager du mieux que je peux… Mais ce soir, pas le temps de fêter. On découpe les plaques noires, on colle des numéros 44 pour la course Junior, et Stéphane, à qui j’ai donné quartier libre sur la moto, s’en donne à cœur joie. Demain c’est mercredi, et à 10h15, je serais au départ de la seconde épreuve, pour 4 tours de manèges…

A 28 ans du matin…

Il est 6h du matin, ce jeudi. Malgré la grosse journée de la veille, je ne dors plus. Je n’ai pas réussi à écrire hier, et je cherche depuis cette nuit comment je vais pouvoir te raconter « ça »… Hier, c’était la course Junior, et j’ai eu l’impression d’aller au boulot. Tout était normal. J’avais donné à Stéphane le droit de faire ce qu’il voulait sur la moto. Je lui ai juste demandé, avant de partir, dans quel sens il avait tourné les vis de réglages, pour savoir ce qu’il avait cherché à faire, en fonction de ce que je lui avais raconté la veille. Et je suis parti, comme ça, faire mes quatre tours de course, sans rien penser d’autre que m’appliquer, et prendre du plaisir. Dans le calme, comme si j’allais au travail, et j’ai tourné la manivelle de mon orgue de barbarie aussi vite que j’ai pu.

Je l’ai senti… A Quarry Bends, succession de 5 virages très rapides, où la moto s’est faite de plus en plus lourde à balancer. J’ai posé le genou dans de nouveaux virages, suis sorti du quadruple droit de Verandah à 211 km/h, et vu la réserve d’essence s’allumer 4 kilomètres plus tôt que la veille.
J’ai compris que les réglages du Chef portaient leurs fruits, rendant la moto moins vicieuse. Je savais que j’étais plus vite, mais je ne savais pas combien. Mardi, j’ai fait la course à 103.3 mph de moyenne, avec un meilleur tour en 21min33sec. Là, je sais que je suis mieux. Sur ces quatre tours, libéré du devoir de réussir, je n’ai pensé qu’à m’appliquer. J’ai juste eu peur quand j’ai vu les pales de l’hélicoptère médical dans le contrebas d’Hailwood’s Height. J’ai eu peur que ce soit Julien. Puis j’ai calculé, en fonction des places et du temps qui pouvait nous séparer, qu’il n’y avait pas assez de minutes pour que ce soit lui et que l’hélico soit déjà arrivé. J’ai soufflé, souhaité de toutes mes forces que l’inconnu du ravin aille bien, et j’ai continué ma route.

J’ai vu la mer à Kate’s Cottage, et j’ai retrouvé mon pote, le drapeau à damier. Et j’ai pas pleuré. Je suis retourné au parc fermé et sur ma route, j’ai croisé une très belle fille qui, elle, pleurait. Céline… Elle pleure la fin de ses peurs, la fin de ses doutes, elle pleure pour moi, parce qu’elle sait depuis la première minute que je n’aurais pas pu vivre sans l’espoir de poser mes roues sur ce circuit. Mon frangin nous rejoint, me saute dans les bras. On en a rêvé tous les deux, et il l’a vécu autant que moi. Stéphane arrive, plus discret. On se regarde, on s’étreint, et on sait… On sait que j’étais mieux sur la moto, je sais que c’est en grosse partie grâce à lui, et il me dira que c’est en grosse partie grâce à moi… Pour être tout à fait exact, il a assaini mon serpent de mer pour que je puisse tourner la poignée encore plus fort.

Et le résultat est là. A un peu plus de 107 mph de moyenne, soit 172 km/h pendant 240 kilomètres, avec un tour en 20min32sec à 110 mph, j’ai explosé mes temps d’hier, et viens d’atteindre les deux derniers objectifs que j’avais pour cette année : descendre dans les 20min30, et décrocher un Replica, petite statuette attribuée aux pilotes qui entrent dans les 110% du temps du vainqueur. Tout vient de m’arriver là. Toutes les cases sont cochées dans ma liste au père Noël… J’ai un sourire crétin figé sur les lèvres. Je pense à Tibo qui a dû rentrer en France plus tôt, regarde mon frère, mon Chef, et ma femme… L’instant est parfait : je suis très exactement là où je voulais être…

Et nous voilà à la fin cette histoire… Alors, pourquoi ? Si j’ai voulu vous écrire chaque jour, sans pitié et sans pudeur, c’est pour te raconter ce qui se passait à l’intérieur d’un gars qui roule sur l’ile de Man. On replace quand même les choses en perspective, ce n’est pas le Tourist Trophy, mais le Manx Grand Prix. Le tracé est le même, la complexité aussi, mais le niveau est moins élevé qu’au TT, et le Manx en étant la voie d’accès. Je ne sais pas si je reviendrais, même si c’est du TT dont je rêvais. Je me suis tellement concentré sur cette course que pour la première fois, je ne sais pas ce qui viendra après…

Mais l’important n’est pas là. L’important, c’est toi, toi qui lit cette bafouille, chez toi, ou discrètement au boulot. J’ai écrit ça pour toi. Je t’ai écrit parce que je suis un petit parmi les petits, sans talent spécial ni fortune. Je t’ai écrit pour te dire qu’il n’y a pas besoin d’être né avec une cuillère en argent dans la bouche, avec un talent ou un don pour y arriver. Je t’écris pour te dire que tout ce qui compte, c’est de rêver, de t’écouter, et de te battre. On n’est jamais les mieux lotis, on sera jamais les meilleurs, mais l’important, c’est de savoir qu’on se bat chaque jour pour faire ce qu’on aime, avec ceux qu’on aime, même si ça rend le quotidien plus difficile. On finira tous par crever, tu sais… L’important, c’est ce qu’on aura fait avant.

Y’a rien de plus con que de tourner en rond sur un circuit, fut-il mythique… Mais que tu veuilles être coiffeur, astronaute, danseuse étoile, ça n’a pas d’importance, tant que ça n’a qu’un but : te rendre heureux. Ce que j’ai voulu t’écrire, c’est que ça ne va pas toujours être simple. Que t’auras peur, mal, ou les deux. Qu’il y aura des concessions et des sacrifices. Que ça prendra du temps, mais que les sexagénaires à la remise des prix hier m’ont prouvé qu’il n’était jamais trop tard. Qu’il n’y a pas de héros, juste des bouts de chair et d’os qui n’ont pas assez de temps sur cette terre pour se laisser aller à la tristesse, à la fatalité. Que certains sont meilleurs que d’autres. Que beaucoup sont bien meilleurs que moi. Et…

Ce que je n’écris qu’à toi, Pimente, toi ma petite fille à qui j’ai donné ce surnom débile pour le piment que tu as apporté ces derniers mois, ce que je t’écris, petite puce qui verra le jour en Octobre, toi qui m’a massé le dos à grand coup de pied depuis le ventre de ta môman Céline cette semaine, toi à qui j’ai fait une jolie chambre avant de changer le cadre de ma moto, ce que je t’écris, ma petite, c’est que tu auras toute la vie devant toi… Que je me fous que tu aimes la moto ou pas, que je me fous de ce que tu choisiras… Que j’espère juste que tu Aimeras…

Je souhaiterais remercier tous les gens qui m’ont soutenu au fil des années, qui m’ont tendu la main quand beaucoup souriaient… A commencer par l’équipe de Tecmas, chez qui j’ai beaucoup appris, mécaniquement et humainement. Le Conseil Général du Cher, Madame Chêne et Monsieur Gomes, qui m’ont apporté un énorme soutien ces deux dernières années. Arnaud Sassonne et Moto Expert, qui ont toujours été à mes côtés, et ne se sont pas foutus de ma gueule quand je passais du haut de mes 18 piges avec mon 125 TZR leur demander comment faire pour être pilote. Ma ville, Mehun sur Yèvre, et Monsieur Koszek, qui m’a toujours envoyé un soutien, même dans les moments difficiles de la saison. A l’IUT de Bourges, l’école qui m’a supporté pendant deux ans, et chez qui je retourne avec plaisir quelques soirs, pour parler moto avec des passionnés dans un amphi. A Cyril Coudière et Axa, sponsor de la première heure… Je te revois, Cyril, à la maison autour du poulet brûlé, me dire « Mais l’ile de Man, monsieur Govignon, l’ile de Man ! ». A l’équipe de SilverPerformance, que j’ai sollicité maintes fois cette année pour rendre la moto un peu plus performante. A JC, qui m’a fait une belle peinture que j’ai honteusement bousillée au rallye de l’Ain, et qui m’a donné la première tape dans l’épaule. A AEB Electricité, mes « Jules-de-chez-Schmidt-en-face » voisins de bureau et arrivés cette année dans l’aventure. A Fabrice Dion et Maintenance Service, pour la chaussette sous le casque, les bougies et le reste. A mes étudiants de Génie Mécanique, qui ont bossé sur mes motos pour les rendre un peu plus vite, le soir, après leurs cours. A Edouard, mécène surprise de la dernière heure, juste parce qu’il trouvait ça chouette. A Steve Cervelin, pour les heures passées au téléphone à m’expliquer comment ça se passait ici. A Seb, pour les pièces à côté de la maison, et les paiements à 45 – 60 jours. A mes potes, JB, JC, Tonton Roland, Pedro, Benoit, la bande des Fleurs de Lys, et Xavier… Aux gars (et aux filles !) de mon boulot qui me supporte au quotidien, même quand j’ai ma tête des lendemains de chute, à Ludo qui m’a fait un bel échappement… A Fabrice, mon patron, qui comprend, me laisse libre et re-signe, même quand l’hôpital me retient cinq mois. A Julien Toniutti, avec qui j’ai beaucoup partagé et appris durant ces 15 jours, et à son équipe, Fred et Pierre, toujours disponible. Au Mig et à Marc Dufour qui m’ont aidé et épaulé pendant ce Manx Grand Prix. A la grande famille des rallyes routiers, à qui j’ai pensé, Christophe, le singe du TT, Sony, Crazy, et Nick en tête. A toutes celles et ceux que j’ai croisés au fil des années, avec qui j’ai partagé un bout de chemin, parfois trop court, à tous ceux que j’oublie, mais qui par une phrase, un message, vous réconforte… Aux pilotes et supporters français venus sur l’ile de Man, avec une attention particulière pour Martial, Eric, Lancelot, John Ross et Fred, que je espère revoir sourire sur l’ile de Man…

A toi, à toi, et à toi, que j’ai tant aimées… si mal (Cavanna)

A Yoann, Luc et Eric, à qui j’aurais aimé pouvoir raconter tout ça…

A mon équipe sur l’ile de Man, Margot, Jessy, Tibo et Stéphane, pour les heures consacrées à ce qu’on réussisse…

A ma famille… T’as vu maman, hein, j’ai pas menti…

A Céline, ma fée, ma russe, mon amour et mon bonheur…

Merci

Relisez les aventures de Momo au Tourist Trophy,

La partie 1 en suivant ce lien : L’AVENTURE DE MOMO AU TOURIST TROPHY – PARTIE 1

La partie 2 en suivant ce lien : L’AVENTURE DE MOMO AU TOURIST TROPHY – PARTIE 2

La partie 3 en suivant ce lien : L’AVENTURE DE MOMO AU TOURIST TROPHY – PARTIE 3

Par |Publié le : 15 avril 2022|4 Commentaires|

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4 Commentaires

  1. Loloblanc 24 juin 2022 à 13h44-Répondre

    Waou … Sacré ascenseur ascensionnel ce récit ! Passion, suspense, émotionsss, humour, lyrisme… j’ai l’impression d’avoir enfin compris ce qu’une ménagère de moins de 50 ans pouvait ressentir devant les Feux de l’Amour.
    Un grand bravo, merci et à quand un bouquin ?

  2. MOULI 26 avril 2022 à 15h11-Répondre

    Un grand grand merci pour ce récit époustouflant, vibrant, passionnant et passionné !!
    Ca colle une belle banane pour ces quelques minutes de lecture volées au taf ;-)
    Merci pour la simplicité à travers cette belle écriture soignée !

  3. Dubois Sylvain 18 avril 2022 à 10h21-Répondre

    Magnifique récit Morgan, un vrai moment de partage ✌👍😉

  4. De Milde Bernard 16 avril 2022 à 12h34-Répondre

    Tout simplement merci d’être un des accélérateurs de mes projets et de mes aventures moto.
    😉👌😁

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