Ça, c’est fait
La passe de Tifoujar en 100 cm3 ? Tu as le droit de ne pas me croire mais … c’est fait. J’ai bien senti au tout début, qu’avec mon histoire de train, de Nouadhibou à Choum, tu pensais que cette aventure allait être une série de subterfuges et d’excuses, pour échapper aux difficultés du terrain et aux faiblesses annoncées de ma moto. Un truc voué au mensonge ou à l’échec, au choix. Mais non, voilà déjà cinq jours que je suis au coeur de l’Adrar avec ma mobylette. Au coeur des plus belles pistes avec pour seul objectif de: 1. te montrer que la Mauritanie vaut la peine d’être visitée 2. mettre à ta disposition sur mon site Kap2cap, des traces GPS dont tu sais qu’elles ont été parcourues avec une toute petite Yamaha 100 cm3, en solo. Donc à toi de jouer maintenant.
Rencontre
D’ailleurs, j’espère sincèrement que tu apprécies. Ce matin, lever de bonheur pour aller explorer un peu plus en avant l’oasis de Mhaïreth. L’une des plus grandes de l’Adrar qui s’étend sur plus de 7 kilomètres mais qui a pas mal souffert de la sêcheresse récemment. Un endroit malgré tout sublime coincé entre roches et dunes. En traversant l’oued, un petit chemin permet de rejoindre une somptueuse vasque d’eau où je découvre 2 machines d’enduro et quatre français. Achille est venu avec son pote François, accompagné de ses parents en appui 4×4. Un trip à la cool qui sent presque le camping sauvage des années 60. Ils me font un thé (au torchon brûlé, c’est une de leurs spécialités …), Laurent le père me fait goûter les noisettes enrobées de chocolat qu’il cultive (seulement les noisettes hein, elles ne poussent pas autour du chocolat) à Montflanquin dans le Lot et Garonne.
Zarga la magnifique
Que c’est bon de reconnecter aussi un peu avec les « siens. » On déconne, on échange nos sensations, nos impressions, nos destinations, faites ou à faire, et on en conclut que la Mauritanie vaut vraiment la peine. Et on se sépare. C’est que j’ai de la route, enfin de la piste, moi. Je ne vais pas te conter mon trajet par le détail mais sache juste qu’aujourd’hui, au détour d’une piste en descente, s’est découvert face à moi le mont Zarga. Des pitons rocheux noir ébène envahis, presque jusqu’à leur sommet, par des dunes ocres sous l’effet du vent.
Splendeur passée
Impressionnant, tout autant que les petites dunes cassées qui tentent de te barrer la route pour y avoir accès. Milieu d’après-midi, Chinguetti me tend les bras. La ville mangée par les sables dont Achille m’a dit dans la matinée que « sa splendeur semblait passée, qu’il était presque trop tard pour la visiter ». Je suis assez d’accord. Je me laisse quand même tenter par une invitation au thé, sur une terrasse avec vue sur la vieille ville et ses silhouettes qui sortent de la vieille mosquée. Habillées du traditionnel costume bleu, on dirait des fantômes. Mais mon regard se porte aussitôt plus loin: plein est, vers le lever du soleil. Là où demain j’ai choisi de m’enquiller les 100 kilomètres de dunes pour rejoindre la ville de Ouadane plutôt que par la piste de tôle ondulée.
Ne pas refaire la même
A croire que cette aventure n’est qu’une succession de retours sur des échecs passés. Cette piste, nous y avions échoué avec Amaury en 2019 avec nos Transalp. Tout simplement par méconnaissance du terrain et pour nous être trop approchés des dunes. En fait, la seule difficulté réelle consiste à sortir de la ville de Chinguetti par une piste au sable mou. J’ai failli réitérer nos erreurs en plongeant de suite dans l’erg alors qu’il fallait rester à gauche, sur la piste des petits villages. J’ai tenté de corriger mais je me suis retrouvé en vain empêtré dans des dunes et des clôtures censées empêcher la procession du sable.
Le pied anglais, tu connais ?
Heureusement, y’a un truc magique avec mon AG 100. Un truc qui marche à tous les coups. Le pied anglais. Ouais, c’est un truc d’hyper pro. Tu coordonnes un bon lâcher d’embrayage avec un bon mouvement de guidon tout en gardant un seul pied au sol pour faire pivoter ta moto, sur place, de 180 degrés, la roue avant en l’air sans avoir avancé ni reculé d’un centimètre. J’ai toujours admiré ça sans savoir le reproduire sauf … avec les 100 kilos de mon AG100. Un jeu d’enfant qui m’incitera sans doute à retenter le coup avec ma T7 à l’avenir.
Tanouchert
Bref, je suis sorti de ce pétrin et ai rejoint la bonne trace. Les guides m’avaient prévenus … « si t’es passé à Azoueiga et Tifoujar, ça sera un jeu d’enfant. ». D’enfant averti mais, je dois avouer que le sable est globalement porteur pour circuler entre de petites dunes, des pistes ensablées où il est finalement assez facile de garder de la vitesse. A mi parcours, j’entrevois au loin une passe. Une piste qui monte doucement avec une sorte de col qui permet de basculer vers l’oasis de Tanouchert où attendent d’immenses troupeaux de chameaux
C’est beau ici, non ?
Je descends vers l’oasis et pointe ma tronche bêtement souriante au poste de gendarmerie où on me demande la fiche. Je leur lance un enjoué: « C’est fou ce que c’est beau ici, c’est même incroyable. » Les deux types explosent de rire. Je comprends rapidement que mon émerveillement est sans doute … leur prison. Muté dix mois à Tanouchert, à moins de vouloir écrire le prochain roman de Tesson ou un Buzzati, c’est sûr que ça doit être longuet.
Et si échangeait tout ?
Là, je me dis que le monde est bien mal foutu. On rêve presque d’être là oū on n’est pas. Moi, j’ai une idée. Faudrait un jour faire un immense bonneteau des pays et des populations. On prend tous les français qui rêvent de voyages et on les envoie en nouvelle Papouasie. Les Russes sur le territoire américain en même temps que les amerloques en Sibérie. Les nord coréens à deux pas de chez eux, au sud et ainsi de suite. Je suis sûr que le monde irait mieux.
Au coeur de l’invisible
J’ai quitté mes gendarmes sur cette idée de rebattre les cartes du monde et continué ma route vers le vertige. Oui, je te dis ça car je suis entré dans une dimension parallèle. Celle des dunes rondes. Les franchir, rouler dessus te fait perdre tout repère. Comme lorsqu’on skie lors d’un jour blanc. Une sensation étrange de flottement sans vraiment savoir si on est en montée ou en descente. Tout aussi jouissif que perturbant. Ouadane se découvre. J’hallucine que ces cent kilomètres que je redoutais tant soient passés aussi vite. J’ai du temps, l’envie de rouler, et si je poussais jusqu’à la structure de Richat ?
Perte de repères
Richat, c’est quoi ? Une structure en forme d’ammonite large de 50 kilomètres de diamètre qui est longtemps restée une énigme pour les scientifiques mais qui serait issue d’une irruption volcanique. C’est aussi un repère clairement visible pour Thomas Pesquet lorsqu’il est tout là-haut. Pour y aller il faut franchir deux petits cols hyper ensablés ou aller errer dans les champs de pierres pour ne justement pas s’ensabler. Un ultime shot, un promontoire central et ça y est, tu y es. Au cœur de quoi ? Au cœur de rien. Allez tu devines gentiment qu’une ligne de crête encercle ce point central mais ça reste assez diffus comparé à observer une vue satellite de cette curiosité.
Fin de l’histoire ?
Même mon drone ne peut rendre compte de cette cicatrice géante gravée sur la terre. En même temps, vu le vent qui y règne, je ne tente pas trop le diable. En retournant sur Ouadane, j’ai été envahi par une étrange sensation. Celle de quelque d’achevé. Presque comme si mon voyage était terminé alors qu’il me reste encore toute la Mauritanie et le Sénégal à traverser. Comme si une page venait de se refermer sur mes mauvaises expériences passées mais aussi comme elle venait de s’ouvrir sur cette révélation qu’est la Mauritanie.
✔ Pour Emmanuelle Marie
Je réalise aussi ce voyage pour collecter des dons et revenir sur Paris en avion avec la petite Emmanuelle-Marie (5 mois) qui doit se faire opérer du coeur par Mécénat Chirurgie Cardiaque. Si tu souhaites participer à cette réussite (100% des dons vont à Mécénat) clique sur ce lien vers → la page de collecte Mécénat Chirurgie Cardiaque
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bravo Lolo tu es un héros ! un gladiateur ! une source d’inspiration pour beaucoup d’entre-nous. Je t’envoie (par chameau) toutes mes ondes positives pour la suite de cette aventure. Force&robustesse ! MERCI mec !
Superbe article. Je les lis tous sans forcément toujours laisser un commentaire. Merci beaucoup et bon courage pour la suite !
NK